ARTS VISUELS
Histoire des idées contemporaines
avec
François Cusset
Séminaire d’histoire des idées contemporaines avec
François Cusset, philosophe et historien des idées.
François Cusset (né en 1969) est un historien
des idées, professeur de civilisation américaine à l'université de Nanterre. Ancien
élève de l'École normale supérieure de Saint-Cloud, ancien responsable du
Bureau du livre français à New York. Il a été chercheur associé au CNRS
(Laboratoire « Communication et politique ») et professeur à l'Institut
d'études politiques de Paris.
Il a publié « Queer
Critics » (PUF, 2002), « French Theory » ( La Découverte, 2003), « La
décennie, le grand cauchemar des années 80
»(La Découverte, 2006),« Contre-Discours de Mai: ce qu'embaumeurs et
fossoyeurs de 68 ne disent pas à ses héritiers » (Actes Sud, 2008), et son premier roman, « À l'abri du déclin du monde »
(P.O.L.) en 2012.
9.10.2012 - Première
séance: Aux origines de la pensée critique (de Kant à Adorno)
La pensée critique, inaugurée par Kant et son
projet de "critique du présent", se prolonge chez Nietzsche, avec son
soupçon radical face à l'histoire et à la morale, puis dans un genre très
différent chez les penseurs de l'Ecole de Francfort, créée au coeur des sombres
années 1930: au croisement de Marx et de Freud, autrement dit de la critique
sociale et des théories de l'inconscient, et tout en en critiquant les limites,
des théoriciens mélancoliques et atypiques comme Walter Benjamin, Theodor
Adorno et Max Horkheimer développent une pensée critique globale et rigoureuse
de l'industrie culturelle, des formes nouvelles de la domination, ou de
l'histoire à sens unique -- autant de théories critiques incontournables dans
lesquelles l'histoire intellectuelle contemporaine puise l'essentiel de ses
sources.
13.11.2012 - Deuxième
séance: Culture et pouvoir (de Williams à Bourdieu)
Il est un point sur lequel la théorie
critique, dans la filiation de l'Ecole de Francfort, se démarque du marxisme
orthodoxe de ses origines: la culture, qui n'est plus seulement un reflet
direct de la domination économique, mais une sphère partiellement autonome,
avec ses modes de pouvoir, de contrainte, de résistance, d'autant plus cruciaux
à saisir que la culture au sens large (des médias aux loisirs) est alors en
passe de devenir le coeur du nouveau capitalisme mondialisé. C'est tout le programme
des "cultural studies", nées en Grande-Bretagne dans les années 1960
autour des travaux de Raymond Williams et Richard Hoggart, et prolongées aux
Etats-Unis et même en France sous la forme d'un dialogue fécond avec d'autres
théories critiques de l'art et de la culture, comme celles de Fredric Jameson
et de Pierre Bourdieu.
11.12.2012 - Troisième
séance: Vers les sociétés de contrôle (Foucault, Lyotard, Deleuze)
Si leurs perspectives philosophiques restent
divergentes, les oeuvres majeures de Michel Foucault et Gilles Deleuze, mais
aussi dans une moindre mesure de Félix Guattari et Jean-François Lyotard, ont
en commun leur insistance sur les nouvelles modalités de la domination et de la
circulation du pouvoir: moins par la discipline des corps et plus par le contrôle
des comportements, moins par la contrainte extérieure et plus par
l'intériorisation (subjectivation), moins par la loi et plus par la norme,
moins par l'extériorité du souverain et plus par l'affectivité et les désirs.
Ces oeuvres fournissent quelques outils théoriques indispensables à une
compréhension de notre présent: la "microphysique du pouvoir", les
"machines désirantes", les "dispositifs pulsionnels", etc.
8.01.2013 - Quatrième
séance: Textes et identités
Face à un pouvoir bienveillant et panoptique,
et à ses violences symboliques, les nouvelles résistances se développent. Elles
ont trait, de plus en plus, à l'affirmation d'une position minoritaire et à la
mise en avant, fût-ce sur un mode critique, des singularités identitaires: si
l'essor des pensées de la minorité, qu'elle soit sexuelle, culturelle ou
postcoloniale, participe au renouvellement intellectuel des cinquante dernières
années, c'est aussi parce que ces résistances ont lieu à même les discours, à
même les textes et les signes -- dont la supposée neutralité est écartée pour
de bon, et dont les effets réels sur les sujets vivants et leurs conditions de
vie (les effets "performatifs") sont explorés en détail, comme chez
Judith Butler ou Gayatri Spivak.